The Witness

The Witness - Test PC

Bac à sable préféré des créatifs en tous genres, offrant une liberté quasi infinie dans les mécanismes et les univers qu’il permet de créer, le jeu de réflexion, le puzzle-game ou encore le jeu d’énigmes se décline généralement en plusieurs sous-genres. Il y a ceux qui misent sur un monde virtuel étrange et fascinant, ceux qui jouent avec les codes du loisir vidéoludique, ceux qui offrent au joueur des challenges à s’arracher les cheveux ou ceux qui au contraire offrent juste assez de difficulté pour qu’un déclic jubilatoire se fasse juste au moment où l’expérience allait devenir frustrante. De temps en temps, les vendredis 13 d’une année bissextile dont la somme forme un nombre premier, alors que toutes les planètes du système solaire sont alignées et que la marmotte voit son ombre, un seul titre parvient à réunir tous ces éléments. C’est le cas de The Witness.

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Comme je m’apprête à dire beaucoup de bien d’un jeu et que c’est très mauvais pour mes nerfs, commençons donc par en dire du mal : Messieurs les créatifs, je veux bien que vous ayez le cerveau très occupé à faire jaillir votre génie comme les terres d’outre-atlantique font jaillir des parodies d’hommes politique avec un animal mort sur le crâne, mais si vous pouviez trouver un moment dans votre emploi du temps chargé pour vous rendre compte que certaines personnes (émotionnelles perturbées, cela va sans dire) ne jouent pas sur un clavier qwerty et mettre en place un menu de réassignation des touches, nous vous en serions éternellement reconnaissants. Bon, c’est peut-être uniquement parce que mon Steam est en anglais, mais là n’est pas la question. Au passage, si vous pouviez ajouter deux-trois options graphiques comme le FOV, l’antialiasing ou encore les divers filtres et textures sans passer par de la bidouille de fichiers de configuration, ça serait sympa aussi, parce qu’un preset « Bas – Moyen- Élevé » ça fait tout de même un peu léger voir franchement foutage de gueule sur une production en gestation depuis des années.

The Witness

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Pour ceux d’entre vous qui vivaient dans une grotte à la fin de la dernière décennie, il convient de présenter brièvement Jonathan Blow, le créateur derrière The Witness. Au delà d’un patronyme parfaitement ridicule, celui-ci s’est principalement distingué avec Braid, sorti en août 2008 sur le Xbox-Live Arcade, puis un peu plus tard sur les autres supports. Mêlant une forte identité graphique et une ambiance sonore remarquable à défaut d’être originale, ce platformer au premier abord simpliste s’est offert une sacrée renommée grâce à sa mécanique de manipulation du temps aussi géniale dans son principe qu’utilisée avec brio dans la conception de puzzles intelligents. Véritable chef d’œuvre, Braid y est pour beaucoup dans la démocratisation du jeu indépendant auprès du grand-public et a contribué avec d’autres titres à en faire un genre à part entière, source de productions au concept original se démarquant de l’invasion de mauvais Gears-of-wars-like que l’époque a connue.

The Witness

Nous étions donc évidemment tous impatients ce que le Maître allait nous pondre ensuite et il faut bien avouer que lorsqu’il annonça The Witness, un jeu de puzzles en open-world avec une bonne louche de Myst parmi ses ingrédients, les froncements de sourcils à l’échelle planétaire ont du générer un bruissement au volume considérable. S’il est vrai que le bonhomme avait largement démontré son savoir-faire avec Braid, passer d’un puzzle-platformer 2D à un jeu d’aventure 3D n’est pas exactement un cheminement tout ce qu’il y a de plus logique et naturel. De plus, nombreux sont les indés qui, après un succès (parfois un peu accidentel il faut bien l’avouer), ne sont jamais parvenus à reproduire l’étincelle magique ayant fait naître leur renommée. La nouvelle production de Jonathan Blow allait-t-elle se montrer à la hauteur des espérances où aurait-on à un pétard aussi mouillé qu’un habitant des îles Kirbati à la faveur de la montée des eaux ?

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Eh bien, après près de huit années de gestation, de nombreux retards, une refonte de sa partie graphique, les bénéfices de Braid engloutis et des emprunts contractés, on peut enfin l’affirmer : oui, The Witness a réussi son pari. Basé sur des séries de petites puzzles qui pouvaient laisser craindre une certaine répétitivité et un manque de profondeur, son gameplay fonctionne au delà des espérances. Pourvu d’une patte graphique qui ne fera sans doute pas l’unanimité mais lui donne une identité forte et marquante, son open-world est riche, varié, intriguant et effectivement, rappelle un peu les sensations qu’on fait naître la découverte de Myst, la liberté de mouvement et un moteur 3D convainquant en plus.

The Witness

Vous aurez probablement lu à droite et à gauche que parler du gameplay de The Witness sans le spoiler est impossible. C’est parfaitement vrai. D’ailleurs, ne vous laissez pas tenter par l’idée de visionner quelques vidéos pour être certain que celui-ci va vous plaire : si vous aimez les puzzles-games, les casse-tête, ces petits tableaux qui mettent vos neurones suffisamment au défi pour relâcher une petite dose d’endorphines chaque fois que leur solution, vous paraît d’un coup évidente, il y a peu de chances pour que vous soyez déçus. Si votre truc, c’est plutôt Myst avec ses mécanismes et ses systèmes complexes, obscurs au premier abord, qui nécessitent de comprendre les choses à une plus grande échelle, vous y trouverez probablement à manger également. En effet, les puzzles de The Witness ne sont pas gratuits et isolés mais généralement les composants d’un ensemble qu’il faudra décortiquer.

The Witness

Généralement plaisants, souvent brillants, parfois à s’arracher les cheveux, ces puzzles qui auraient pu être paresseux et placés uniquement pour booster la durée de vie sont une vraie force du titre. Seul regret pour ma part : quelques passages du jeu sont complexifiés par des difficultés de lisibilité que j’ai trouvées très désagréables. Il faudra également noter qu’une bonne partie des épreuves est inaccessible aux daltoniens, dommage mais  malheureusement compréhensible.

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Puisque l’on ne peut pas parler du gameplay de The Witness sans en perturber l’expérience, parlons donc de son fameux monde ouvert. À mi-chemin entre le cartoon et le réalisme, son graphisme arbore une palette de couleurs variées associée à une certaine douceur dans ses formes grâce à une gestion des ombres très fine, donnant régulièrement droit à des panoramas assez bluffants.

The Witness

Diversifiés tant dans leurs teintes que leur construction, les différents environnements ont tous une identité marquée permettant de rapidement trouver ses marques. Parfaitement dénué de sens de l’orientation, j’ai tout d’abord été déboussolé (hoho) par la quasi-absence de cartes et autres dispositifs de localisation sur cette île qui semble au premier abord immense et sur laquelle l’on s’égare vite en voletant de puzzle en puzzle. Passé les premières heures, ce  sentiment d’immensité s’estompe et l’on commence à prendre ses repères, déjà parce que la surface de jeu est au final assez réduite, ensuite parce que The Witness encourage à se balader et à partir sur de nouvelles pistes dès que l’on se retrouve bloqué un peu trop longtemps. On se construit alors sa petite carte mentale, on se rappelle être déjà passé par là grâce à ce bâtiment aux jardins si particulier et l’on se met à mitrailler la touche « screenshot » pour se rappeler de l’emplacement de certains éléments paraissant importants.

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Terminons par les défauts, au delà de l’absence assez incompréhensible de réglages des commandes ou des détails graphiques. Techniquement, le jeu s’est comporté sur ma machine de manière assez étrange, offrant quelques fois une fluidité parfaite avant de saccader sévèrement lors de la partie suivante. Comme je l’ai déjà mentionné, des passages se révèlent pénibles en testant la résistance à la frustration plutôt que l’intelligence du joueur en imposant des puzzles à la lisibilité volontairement compliquée. La première fin, quant à elle, laissera un goût amer et n’ayant pas souhaité me spoiler pour l’écriture de ce test, je ne peux qu’espérer que la ou les fins alternatives (mais évidemment beaucoup plus difficiles à atteindre) se révèleront plus intéressantes. Fin qui justement, arrive un peu vite, surtout au prix de lancement inhabituellement élevé pour un jeu indé, mais cela se pardonne aisément en imaginant le boulot qu’à représenté non seulement la création des puzzles, mais les liens entre tout ce joyeux bordel pour construire quelque chose de cohérent et qui s’enchaîne naturellement. Espérons que son auteur gagne avec cette nouvelle production financièrement très risquée de quoi nous surprendre à nouveau, d’ici une petite dizaine d’années peut-être.

The Witness

Conclusion :

Beau, intriguant, intelligent, The Witness parvient à placer la barre encore plus haut que le coup de génie que fut Braid. Mélange (presque) parfait de réflexion, de découverte et d'apprentissage, il compense amplement ses quelques problèmes pour la plupart bien pardonnables devant l'ampleur du travail accompli. À la fois accessible et profond, difficile de ne pas le conseiller à quiconque aime se creuser la tête, qu'il soit plutôt Myst ou plutôt Professeur Layton.

Site officiel

Note :

9/10

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